Journal de Béatrice S██████
Je n'ai aucune foutre idée de si ce journal sera un jour lu par un être humain mais de toute façon je n'ai plus rien à perdre.
Je vais mourir ici.
Je sais que je vais pas réellement laisser de trace, que l'on ne parlera pas de moi dans des bouquins ni quoi. Mais au moins, je souhaite raconter mon histoire. Juste … Je veux l'impression d'avoir existé un jour dans ce monde pourri qu'est le nôtre.
Donc, c'était… Il y a un certain temps.
En fait, j'ai plus la notion de jour et de nuit, ici tout est allumé H24.
Donc bref.
J'étais une étudiante relativement normale. Pas la plus intelligente mais je me débrouillais. Sauf que bien sûr, qui dit étudiant dit soirées. Et qui dit soirées d'étudiants dit alcool.
Beaucoup d'alcool.
Un matin, je suis rentrée totalement bourrée chez moi et en tentant de me garer sur le parking de mon immeuble j'ai éclaté un pigeon. Et je ne suis pas vraiment sûre de pourquoi (cerveau de personne ayant titubé je présume) mais…
J'ai trouvé ça hilarant.
Alors je me suis dit que ça serait encore plus drôle d'en buter un peu plus.
Il suffisait de mettre deux-trois morceaux de pain pour qu'ils reviennent au bout de quelques minutes. Et le massacre a commencé comme ça.
Enfin bref.
À un moment, il y a eu un chat noir aux yeux verts qui traversa la rue d'en face. Comme vous pouvez vous en douter, j'ai foncé dedans, me disant qu'un animal plus gros c'était plus de fun. Sauf que ce chat, au moment de l'impact, il a disparu.
Je suis sortie de ma voiture et j'ai vu un grand type qui tenait le-dit chat. Le genre de type chelou qui te donne l'impression qu'il te juge dès qu'il te voit. Il portait une sorte de grand manteau en cuir, avec quelques pins en métal rouillé y étant accroché. On s'est fixé une minute entière puis il a regardé le parking qui était jonché de cadavres. Il m'a demandé un truc du genre :
"Pourquoi tu as fait ça ?"
Et je lui ai répondu
"Pour déconner. Allez ça va, pète un coup quoi !"
Il m'a regardé de haut en bas quelques secondes, a murmuré quelque chose comme "Un parfait sujet de test", et puis il s'est jeté sur moi.
Après ça, blackout, plus aucun souvenir.
Je suppose qu'il m'a assommée.
À mon réveil, j'étais au beau milieu d'un entrepôt, totalement nue, entourée d'humains dans de minuscules cages. Ils étaient tous à quatre pattes, aboyant, gueulant, bavant…
Ils étaient répugnant.
J'ai essayé de me lever mais c'est à ce moment-là qu'un énorme porc en tenue de boucher à débarqué, tenant un couteau ensanglanté. Il m'a chopé par la nuque, m'a soulevée et m'a secoué en grognant :
"saloperie d'bestiaux, comment l'a fait pour s'barrer c'lui la ?"
Ce à quoi j'ai répondu :
"Pitié je ne viens pas d'ici je ne viens pas d'une de vos cage laissez moi partir je vous en prie !"
Il m'a regardé d'un air surpris et a gueulé :
"Mike ! Viens voir ça ! On a un d'nos bestiaux qui parle !"
Un second cochon débarqua, avec une tenue de véto, une seringue dans une main et un nouveau né dans l'autre. "Ben alors ? Elle a l'air parfaitement normal c'te bête."
"Non non, je te jure qu'elle vient de parler ! T'imagines si c'est une sorte de génie ?! On pourrait se faire un paquet de fric, les singes adorent les sujets rares pour les vivisections sans anesthésie."
Et à ce moment-là que j'ai commencé à me rendre compte de la situation. J'ai commencé à beugler de la manière la plus bestiale possible. Le porc me fixa d'un air amusé puis il répondit à son confrère :
"Il m'a l'air parfaitement normal. Tu devrais prendre des vacances Antoine, t'as des hallucinations."
Le porc se frotta la tête en marmonnant puis me choppa par la jambe et me traîna jusqu'à une sorte d'enclos minuscule. Ça faisait un mal de chien. Il me balança dans l'enclos et je me rendis vite compte que d'autres femmes étaient tout autour de moi en train de manger une sorte de bouillie.
Quand le cochon fut parti j'ai essayé de leur parler mais seul quelques cris et grognements me répondirent. Je devais me rendre à l'évidence : j'avais atterrit dans un endroit des plus ignobles où les rôles animaux et humains étaient inversés. J'ai constamment l'impression d'être observée, par je ne sais pas trop quoi mais je pense que c'est le type qui m'a envoyé là.
Je n'arrive pas à m'habituer à cette vie de merde, ce qui me paraît logique.
On passe nos journées à manger, dormir, tourner en rond, se faire administrer des antibiotiques de merde et pour les femmes, on doit aussi faire de la reproduction pour l'élevage. C'est ignoble. Jusque là, j'étais presque aux anges grâce au fait que je sois stérile. Mais j'ai entendu l'un des porcs dire il y a jours qu'ils allaient envoyer à l'abattoir les individus les moins productifs. Je crois qu'ils parlaient de moi.
Je ne sais plus quoi faire. Je vais mourir. Je ne vais jamais revoir ce que j'aimais. Je veux retourner chez moi. Je veux être à la maison. Papa, maman, aidez moi, je