Le Messager
Tremblez, ô incroyant, devant la lumière née !
Elle vous ramènera plus près de la raison.
Tremblez de tout votre être face à la vérité,
Recevez du pouvoir toute l’absolution.
Passez à mon côté le saint marché de l'ange
Donnez au messager une simple pièce d’or.
De cet échange auguste vous obtiendrez l’étrange,
La marque véritable parcourra votre corps.
Apporter le mensonge, Dieu me l’avait proscrit.
Venez ainsi à moi, prenez ma connaissance :
Ce don-là ne requiert ni texte ni manuscrit,
La pureté de l’âme taira votre ignorance.
Que cette seule règle vous soit d’abord connue :
Que science pour acquérir, il vous faudra sonder
Votre âme augure et nue ; qu’il soit, par sa venue,
Le seul chemin d’accès à l’unique vérité. »Chant du Messager
Voilà les quelques vers qui m’avaient amené jusqu’à cet homme, ce reliquat vivant des souvenirs de l’humanité, cet homme d' église maigre, maladroit, portant sur son visage les traces de souffrances passées. Il était là, calmement assis sur un vieux fauteuil. Au vu de son état de dégradation, celui-ci devait être en possession du curé depuis plus d’un demi-siècle. Alors c’était donc lui ? Le seul homme encore en vie à avoir croisé la route du Messager ? Sur le bureau rudimentaire, entre lui et moi, une vieille photographie qui le montrait tout sourire, à côté des autres mercenaires qui avaient combattu l’entité. Une belle brochette de casse-cous. Je cherchais à déceler un quelconque signe de peur, une infime conscience de ce qu’ils allaient vivre. Mais non. Les quatre hommes regardaient docilement l’objectif, ne laissant rien paraitre de la dangerosité de leurs missions.
- Vous croyez en Dieu, n’est-ce pas Monsieur Sylvestre ?
La question me prit de court. L’espace d’un instant, le tragique cliché m’avait fait oublier ma mission.
- Je vous en prie, appelez-moi Géraud. Oui, mon père, en effet, je crois en Dieu. Et cette affaire me taraude beaucoup. Ce Messager me paraît dangereux. J’ai un mauvais pressentiment.
- C’est bien normal : vous êtes en train de comprendre quel est le pouvoir de cette chose.
- Il ne fait que révéler la nature de Dieu. Vous-même n’en êtes pas mort. Je ne comprends juste pas pourquoi notre ennemi commun veut l’utiliser. Cela n’a pas de sens… Si j’étais à leur place, je le détruirais.
- Je n’ai jamais dit être un ennemi de S.A.P.H.I.R. Mais pour répondre à votre question, il faudrait que vous…
- Vous comptiez gardez vos petits secrets ? Nous nous étions mis d’accord !
- Oui, mais cela remonte à si loin dans ma mémoire…
La façon qu’il avait de lâcher ses phrases, comme si chacune d’elle lui demandait un effort surhumain, comme si chaque mot lui coupait la respiration, me mettait mal à l’aise. Mais c’étaient les instructions. Je devais approcher Piotr Diori et lui soutirer les informations sur le Messager.
- Vraiment ? Pourquoi vous ne commenceriez pas par l’opération Lettre à la Poste ?
- Lettre à la poste… Ah oui ! LaP !
- Oui, et en détails, s’il vous plait. Je vous enregistre. Veuillez donner votre nom et votre nom de code au moment de la mission au début de l’enregistrement, cela simplifiera les choses. Ne donnez pas de dates. C’est pour la sécurité des données.
Témoignage de Piotr Dikoriv, Mercenaire au moment des faits (Opération LaP)
Bonjour, je suis Piotr Dikoriv. A l’époque, mon nom de code était « LaP-1 ». La mission était commanditée par un groupe inconnu, il avait des moyens qui semblaient illimités. Nous étions quatre à l’époque, c’était avant que Virghil quitte les « Chien de Fusil ».
Pouvez-vous me faire une courte description des trois autres membres ?
Bien sûr, il y avait donc Virghil «VC » Georkuvitch, comme je vous le disais plus tôt. C’était un grand gaillard, il était arrivé en France pendant la guerre, ce type parlait extrêmement bien français. Il devait être roumain, si je ne me trompe pas. Avant d’être mercenaire, il écrivait. Et si vous vous demandez, « VC » c’est pour Vieux Con.
Le chef de la bande, c’était Paul « Popol » Audace. Vous pouvez vous en douter, avec un nom pareil, il était forcément français. Quoique, maintenant que j’y pense, il aurait très bien pu être belge. C’était un mec de la vieille école, Commandant dans l’armée française. Il nous prenait seul à seul à chaque début de mission, histoire de nous mettre à tous un coup d’press. Je ne l’ai jamais vu se battre frontalement, c’est sûrement parce qu’il ne savait pas se battre.
Et puis Adolphe « Boitépiss », je ne me rappelle plus son nom, cependant je me souviens que ce gars était un alcoolique notoire, d’où son surnom. Enfin, paix à son âme, la ou il est la bière est sûrement moins chère.
Les ordres étaient simples : nous devions tuer l’entité. Et si cela se révélait impossible, alors nous devions trouver un moyen de l’enfermer. Nous marchions donc dans la neige, en suivant les traces du Messager.
Pour ma part, j’étais devant, armé d’un AK47. À environ 4 mètres derrière moi, Popol et Virghil suivaient. Ils étaient tous les deux armés de vieux FAMAS de l’armée Française. Boitépiss était sur notre droite, à 50 mètres en hauteur, armé d’un fusil de précision.
On suivait la créature de loin. On attendait qu’elle se terre quelque part.
Au bout de six heures de marche, nous l’avons vue entrer dans une grotte, en plein milieu d’une forêt d’arbres gelés. Popol avait décidé de camper devant la grotte, à couvert derrière une butte de terre, en attendant le jour. C’est Virghil qui a pris le premier quart. S’étant armé de lunettes de vision nocturne, il s’est rendu sur le haut de la butte.
Ce soir, Popol est venu vers moi et à commencer à me parler. Il m’a raconté l’une de ses plus grandes hontes. Pendant une mission, dans un moment de stress extrême, il s’était délibérément placé derrière un de ses soldats pour se protéger. Ce soldat s’est pris une balle et en est mort. À peine avait-il fini son récit qu’il pleurait déjà comme un gosse. Il m'avait prit par le col et me disait que si l'on obéissait au ordres, il ne pourrait jamais découvrir la vérité sur Dieu. Cela le hantait, il voulait savoir qui est Dieu, pour savoir si ses péchés lui seront un jour pardonné. Je savais qu'il était constamment hanté par son erreur. Je ne sais pas trop pourquoi je me rappelle si bien cette soirée. Peut-être que l’intensité de notre amitié m’apparaissait à ce moment, au milieu de rien, alors que la neige continuer de flotter autour de nous. Je ne m’en suis rendu compte que plus tard, mais la neige refusait de tomber à cet instant, elle flottait… littéralement. Et une chaleur réconfortante nous entourait, c’était l’effet « secondaire » de la présence de notre cible.
Soudain, nous vîmes Virghil sortir de la brume neigeuse et nous faire un signe. Je me hâtai de le rejoindre, pendant que Popol réveillait Boitépiss, qui était tranquillement endormi contre un arbre. La créature était devant Virghil, entourée de ce qui nous paraissait un nuage de cendre. Je lui fit face, et la sensation de chaleur m’envahit de nouveau, avec bien plus de force que tout à l’heure. Virghil était comme paralysé. Au moment où le temps me sembla s’arrêter, la créature entonna un chant.
C’est le chant qui m’a mené jusqu’à vous ?
Exactement. Quand elle eut fini son chant, elle me tendit sa main, pour envelopper la mienne de ses doigts gigantesques. Elle me dit à voix basse : « Passons un marché, humain qui apporte le feu ». Je n’osai lui répondre. Elle continua :
- Votre âme est-elle pure de tout péché ?
- Je ne crois pas, j’ai fait beaucoup de mal…
- Votre clairvoyance allègera la dureté du marché. Posez votre question, humain.
- Qui est Dieu ?
J’avais posé la question intuitivement, sans même y réfléchir. Et sa réponse fut douce à mes oreilles. Pendant qu’elle me répondait, toute force physique quittait peu à peu mon corps. Je suis tombé alors doucement dans la neige. Si vous vous posez la question, sachez que je ne répèterai ce qu’elle m’a dit à personne d’autre. Je compte bien garder ce secret jusqu’au trou.
Vous vous demandez comment est la créature, n’est-ce pas ? J’ai eu le temps de l’observer un peu avant de tomber dans les pommes. Son corps était très féminin, d’un blanc éclatant. Elle portait une toge aussi. Ses bras étaient étranges, immenses, touchant le sol et ses pieds ; comme composés de centaines d’armes, de toutes les époques. À la place de son cou se trouvaient quatre grands anneaux ciselés d’or. Sa voix était grave, très grave.
Le Messager devait faire dans les trois mètres, peut-être même trois mètres cinquante.
Ce fut peut-être la beauté de son visage qui me marqua le plus.
Avant de m’écrouler totalement, j’ai aperçu Boitépiss fondre sur le Messager. Tout en m’attirant à lui, il tirait sur la créature avec son 9 mm. Puis, je l’ai vu se prendre un coup et voltiger à trois mètres de là ou nous nous tenions. À ce moment-là, j’étais encore conscient, mais complètement paralysé par une fatigue aussi subite qu’inexpliquée. Je revois cette scène comme dans un rêve, ou bien un vieux film kitsch. Boitépiss revint en titubant vers moi, pour me mettre à couvert derrière la butte. Popol avait dégainé son arme automatique et mettait en joue l’entrée de la grotte. Virghil, lui, était en état de choc : il avait à peine bougé depuis le moment où il l’avait aperçu, et refusait à présent de nous rejoindre. Je me suis alors laissé emporter par le sommeil, et n’ai rien pu voir de la suite des événements.
À mon réveil, Adolphe gisait à mes côtés, dans le blanc de la neige, à l’endroit de notre campement de la veille. Virghil avait enfin fini par sortir de son état de choc. Il ne disait rien et regardait en direction de la grotte. Je ne voyais pas Paul. Les autres m’ont dit qu’il était reparti voir l’Ange, pour lui demander comment pouvait-on l’enfermer.
Je me suis levé d’un coup avec l’intention de monter sur la butte. À environ dix mètres de l’entrée de la grotte se tenait Popol, qui parlait avec la créature. Son micro était coupé. Quelque chose comme dix minutes plus tard, il s’est retourné vers le campement, tout sourire. Il avait refermé sa sacoche et allumé son micro.
- Bon, les gars, j’ai conclu un pacte avec le Messager. Il m’a donné le moyen de l’enfermer, tout est dans m…
Une détonation brusque et écrasante fit plier en deux le corps de Paul. Il tomba à terre. Au nord, à environ deux cents mètres d’ici, apparurent des hommes. Ils devaient être une vingtaine, vêtus d’une tenue tactique noire. Sur leur veste, j’apercevais les lettres « IRME » et le logo des Suppresseurs.
L’Institut existerait donc bel est bien. Vous pouvez m’en dire plus ?
Bien sûr. L’Institut de Recherche sur les Monstruosités et leur Elimination avait toujours été une légende pour moi. Enfin, jusqu’à ce que je les voie à l’œuvre. Selon mes sources, ils sont vraiment discrets. Je ne les ai vus que deux fois, en 40 ans de carrière. Ils sont super efficaces. Je les ai vus s’attaquer à un mec qui pouvait se téléporter. Ils l’ont bloqué dans son « voyage », en fermant une porte à l’endroit où il devait apparaitre. Ils ont une connaissance extrêmement précise des bizarreries de notre monde. Je ne sais pas trop quel but ils poursuivent, mais ils paraissent vraiment bien organisés. Je sais juste que leur groupe est divisé en plusieurs branches : la Branche Suppression ; ceux qu’on voit souvent, anonymes, sur les grands théâtres d’opération, et plus rarement en groupe quand ils doivent supprimer une « Bizarrerie ». J’ai également eu vent d’une branche « Appréhension », spécialisée dans la recherche et d’une branche « Traque », qui serait chargée de trouver les entités anormales. Je ne sais rien de plus, malheureusement.
Bien, poursuivez votre récit, vous en étiez à l’apparition des « Suppresseurs »
Oui, nous avons dû fuir, nous ne pouvions revenir sur la zone, où nous étions accueillis par des tirs venants du groupe de combattant. Redoutant leur légendaire efficacité, nous avons décidée d’abandonner la zone. Le lendemain, je suis revenue avec Adolphe récupérer le corps de Paul, nous l’avons enterré sur la colline face à l'antre du Messager. Du coté de la grotte, gisait le cadavre calciné, ouvert et saignant de celui ci, entourée par les corps de quelques Suppresseurs malchanceux.
Fin de l’enregistrement du témoignage de Piotr à propos du Messager.
- Vous voulez dire que L’Ange est mort ? Je serais venu ici pour rien ?
Je me posais légitimement cette question, empli d’appréhension et de crainte… La crainte que mon voyage n’ait servi à rien.
- Oui, il est mort.
Tout en disant cela, il se leva de son antique siège, et me fit signe de le suivre.
- Je dois vous montrer quelque chose, Géraud.
Avec difficulté, il entreprit de traverser son salon, arrivée devant une bibliothèque encore plus pitoyable que le fauteuil, il me tendit une boite en bois, sur le couvercle était cisellé des symboles étranges. Piotr l'ouvrit, face à moi, à l'intérieur se trouvait un coeur. Relié à la boite par un réseau de veine et d'écorce, le coeur battait. La pièce se remplit d'une odeur de sève et je sentais une chaleur réconfortante me parcourir.
- Voici le coeur du Messager, son "âme", je l'ai retrouvée dans le cadavre ouvert de celui-ci. Je peux vous le confier. Si vous goûtez au liquide qui se trouve dans le coeur, il répondra à votre question.
Je réfléchissais, fallait-il confier cette objet à la fondation ? Piotr avait gardé pendant 7 ans précautionneusement ce "coeur". Il me parraissait un homme de confiance. Je l'ai alors regardé dans les yeux, et lui intima l'ordre de refermer la boite.
- Je vous la laisse, elle est en sécurité avec vous.
Pendant mon retour au Site Aleph, je gardais en tête cette histoire tellement étrange. J'était habitué aux entités de la Fondation. Mais je doutais de ma propre capacité à continuer à croire, si je posais la question à la boite du Messager.
Après tout, avais-je vraiment envie de savoir qui était Dieu ?
Le Coeur Dans une Boite (Pas encore dév)
Salut, ceci est un projet d'écriture que je n'ai pas commencé, si tu a envie de collaborer avec moi pour écrire un conte, n'hésite pas à me contacter sur le discord de la fondation ou en mp